Mérillac: La vie en autonomie à Nomade land

Il y deux ans, nous avions rencontré Fred alias Solo Frey, ancien ingénieur du son, sur son terrain sauvage où il vit depuis six ans en autonomie énergétique et alimentaire. L’eau a coulé sous les ponts depuis. De retour en ce mois de septembre à Nomade Land, à deux pas du petit centre bourg, Fred nous accueille avec Myriam, sa compagne. Ce jour, le duo est sous le feu des projecteurs de TV5 monde.

Rien n’a vraiment changé en deux ans à la Ville Enlée si ce n’est la végétation qui continue de prendre ses aises. Je reprends le même petit chemin enherbé presque invisible de la route pour me rendre chez Fred, plus connu sous le pseudo de Solo Frey. Des voix s’élèvent derrière la haie d’arbres. Solo ne serait-il plus solo ? Hâte de voir ce qu’il en est. En effet, Solo Frey n’est plus en solo mais en duo. « Depuis un an, Myriam vit avec moi. Elle était venue me voir et j’ai fini par lui dire : si ça te plait, tu peux rester, et c’est ce qu’elle a fait à ma plus grande joie » explique le maître des lieux qui ne fait qu’un avec la nature.

Son mode de vie est le même, à savoir se nourrir quasi exclusivement des plantes, fruits et légumes offerts par son terrain, et utiliser l’eau filtrée de l’étang pour boire et se laver. La seule technologie présente est les deux panneaux solaires afin de recharger les téléphones portables. « Ici, le temps mesuré n’existe pas, le temps ressenti, oui. »

Mais alors, être à deux maintenant, c’est aussi deux fois plus de boulot non ? Résolument optimisme, Fred répond en souriant : « Au contraire, c’est deux fois moins puisqu’il y a deux bras supplémentaires. En plus, cela fait deux fois plus d’idées. Moi je ne pensais qu’au côté pratique mais depuis l’arrivée de Myriam, il y a une touche féminine. Il y a bien plus de fleurs qu’avant, c’est chouette ».

Comment ne pas se plaire ici ?

Myriam a tout quitté à Anvers pour s’installer à Mérillac. « Comment ne pas se plaire ici ? » lance-t-elle dans un grand sourire. Photographe de métier, elle capte de nombreux clichés d’animaux et d’insectes de la campagne qu’elle vend ensuite sur des plaques de plexiglass aux visiteurs d’un jour ou de passage à Nomade land. « On fait aussi des savons et des cartes postales et une expo des photos de Myriam est en pourparlers avec la Baie de St Brieuc ».

A la belle saison, histoire de se faire quelques sous, les produits sont vendus devant la roulotte boutique, « en hiver elle sert aux sans-abris de passage dans le coin. J’ai pour habitude de dire aux gens : si vous voyez quelqu’un à la rue, donnez-lui mon numéro » explique Fred qui a le sens de l’entraide et de la solidarité chevillé au corps. Il se fiche pas mal du « qu’en dira-t-on » car il a toujours eu la foi en son projet. « Notre modèle sociétal est en échec. Pour sortir du système, il faut tendre vers l’autonomie. Je fais partie de ceux-là».

Patience et humilité

Mais n’allez pas croire que la vie en autonomie est synonyme de farniente, bien au contraire, elle requiert de l’organisation et du temps pour le séchage des plantes (même les potirons et poireaux) et la lacto-fermentation. Cela demande patience et humilité. « On a bien essayé de faire sécher les courgettes et de les faire lacto-fermenter, le résultat n’a pas été probant, alors nous les préparons désormais façon pickles, ainsi elles gardent tout leur croquant. » Le pain pita est quant à lui préparé avec la farine de tilleul produite in situ et l’orteil du prêcheur, un flageolet perpétuel qui résiste bien au gel, se retrouve souvent dans l’assiette.

Fred et Myriam achète de temps en temps des pois chiches et du riz, pour l’instant impossibles à faire pousser, mais le duo ne désespère pas d’y parvenir un jour, surtout pour le riz. En attendant, le sol fertile « parce qu’on lui fiche la paix » est généreux, il suffit de récolter ce qu’offre la nature le longs des allées qui parcourent le terrain resté au maximum sauvage afin de conforter la biodiversité. Inutile de préciser que le couple n’utilise aucun traitement.

Continuer à développer Nomade land

Fred et Myriam veulent continuer à développer ce lieu devenu une sorte de laboratoire de l’autonomie. On y vient de toute la France et parfois de bien plus loin pour s’inspirer des techniques de Fred et les reproduire. « Des gens qui ne se rencontreraient pas ailleurs le font ici, en toute simplicité volontaire ». A la belle saison, Nomade land est ouvert chaque week-end aux visites. On y organise aussi des conférences (il y en a une avec Guillaume Taburel sur le déménagement et l’aménagement du territoire en présence du maire), des cercles de paroles, du qi gong…

« Nous allons aussi proposer des stages sur comment vivre en harmonie avec la nature et développer de l’habitat léger pour des retraites au calme » poursuit Fred qui souhaite aussi garder le contact avec les locaux. « Les gens passent nous faire un coucou, on s’entend bien avec tous les habitants du village ». Il faut dire que ce lieu de poésie vivante attire plus qu’il n’intrigue. Les musiciens ne s’y trompent pas, une pianiste nomade est passée par là ou encore un jeune saxophoniste qui transportait son instrument sur son vélo. Fred et Myriam aussi sont musiciens. Une fois par mois, ils jouent au Narguilé à Langourla lors des soirées scène ouverte. Ils se sont également produits à l’éco-lieu d’Alexis Robert à Paimpont, là même où vivait Fred avant Nomade land.

Un réalisateur canadien inspiré

Cette façon de vivre, loin d’être loufoque, est arrivée jusqu’aux oreilles de TV5 monde. Bruno Boulliane, réalisateur de TV5 Canada est donc venu faire un reportage à Mérillac. « Avec l’équipe de tournage, nous restons 5 jours sur place pour filmer la vie en autonomie de Solo et Myriam. Ce reportage est destiné à l’émission « En marge du monde » qui retrace des portraits de nouveaux choix de vie en marge de la modernité. L’émission qui en est à sa 3e saison diffuse 10 épisodes par an. Le film tourné ici devrait être diffusé à l’automne 2024 sur TV5 Canada, il sera aussi visible en ligne » explique-t-il avec son accent charmant avant de préciser que lui aussi était “tenté par une nouvelle vie en autonomie.

Contact : solofrey@free.fr

Delphine Jeannest

 

 

Bruno Boulliane, réalisateur canadien de documentaires (au centre) est venu filmer la vie en autonomie et en simplicité volontaire de Myriam et Fred alias Solo Frey.

Solo Frey à la Une de L’hebdomadaire d’Armor. C’était dans notre édition du 23 octobre 2021.

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