L’école à la maison sera très limitée

Posté dans : Article à la une 0

Dans son discours sur le séparatisme, Emmanuel Macron a indiqué que le droit d’instruire ses enfants à l’école serait strictement limité aux raisons de santé. Des familles qui pratiquent l’école à la maison ou y réfléchissent s’inquiètent de cette restriction.

Dans son discours, le président de la République a précisé que « l’instruction à domicile sera strictement limitée, notamment aux impératifs de santé ». Le mot « notamment » a sans doute son importance mais pour les parents qui pratiquent cette forme d’instruction, l’inquiétude est grande. Cette mesure devrait être incluse dans un projet de loi sur le séparatisme qui sera présentée au Parlement en décembre. L’un des motifs qui poussent des parents à garder leurs enfants à la maison est souvent un mauvais vécu scolaire pour eux-mêmes mais ce n’est pas le seul. À Broons, Julie et Sacha Lemercier, ont choisi cette voie. L’école à la maison a déjà commencé pour Eulalie qui a trois ans et ils ont bien l’intention de suivre le même chemin pour Hermione âgé d’un an. « On a eu tous les deux un très mauvais vécu scolaire mais ce n’est pas la seule raison de notre choix. En grandissant, on a pris du recul sur le système scolaire », indiquent Julie et Sacha. Le couple s’est mis à se renseigner sur l’éducation, à lire des ouvrages, à potasser les recherches de pédagogues « différents ».

Trop de classements et notations à l’école

« J’ai lu pas mal de choses sur l’école. Le constat final n’étant pas super, on essaie de trouver une petite porte de sortie », ajoute Sacha. Cette porte de sortie c’est de travailler le programme scolaire à domicile. Quels reproches font-ils donc à l’école de la République ? « C’est une politique trop élitiste, on y pratique trop les classements, les notations. Il y a un réel manque d’écoute de l’enfant, un manque d’attention à son égard », estime le couple. Ils indiquent tous les deux avoir été freinés dans leurs apprentissages puis avoir cessé de vraiment travailler à l’école. « Il y a bien sûr des profs qui font tout ce qu’ils peuvent, ils sont tellement bons qu’ils donnent envie de devenir prof. Personnellement, j’en ai rencontré une comme ça mais mon père m’a dit que  je ferais mieux de faire un vrai métier ». Constat un peu dur, les enseignants très impliqués dans leur fonction n’apprécieront pas forcément.

La famille Lemercier a fait le choix de l’école à la maison et espère bien pouvoir continuer.
La famille Lemercier a fait le choix de l’école à la maison et espère bien pouvoir continuer.

Un suivi quotidien

Eulalie a donc entamé sa scolarité à domicile. Sur quelles bases ? « La base de travail, c’est le programme de l’Éducation nationale que j’ai étudié. Je me sers aussi un peu de Montessori », explique Sacha. Il passe environ trois à quatre heures avec Eulalie pour l’instruction et Julie environ deux heures. En parallèle, ils effectuent chacun des temps partiels. « On a commencé officiellement l’école au début du mois de septembre. On a prévenu la mairie de Broons comme on doit le faire. Ils nous ont dit que c’était la première fois qu’ils rencontraient cette situation. Sur un agenda, je note pour chaque jour ce qui a été fait et les horaires effectués pour être capable de savoir où on en est. Ce qui est bien c’est qu’on va au rythme de l’enfant et qu’on peut tenir compte de ce qui s’est fait la veille pour préparer le lendemain » poursuit Sacha.

 « L’intérêt, c’est que chaque famille le pratique à sa façon, selon sa situation et ses besoins. C’est vraiment très personnel », ajoute Julie. La décision de Macron ? « C’est regrettable de priver tout le monde à cause de quelques-uns. Ce n’est pas l’école à la maison qui favorise l’endoctrinement des enfants. Des familles dont les enfants sont scolarisés peuvent très bien détruire à la maison tout ce qui se fait à l’école ».

Et la socialisation de l’enfant ? « Il n’y a aucun souci à ce niveau-là. Au parc par exemple, Eulalie est la première à aller vers les autres. Et puis, on a prévu le recours aux associations pour toutes les activités qu’elle aura envie ou besoin de faire comme la musique, le sport ou autre chose ».

 

 

 

 

A Rouillac aussi

À Rouillac, deux couples ont aussi beaucoup réfléchi sur cette question même s’ils n’ont pas suivi le même chemin que Julie et Sacha. Pour Bertille, leur petite de presque trois ans, Mélanie et David avaient très envie d’une école « parallèle ». Mélanie avait même songé à en créer une « mais vu les démarches, les dossiers à faire, le coût de l’opération, j’ai laissé tomber ». Pour David, les programmes de l’Éducation nationale « se sont dénaturés petit à petit. On apprend n’importe quoi aux enfants et aux jeunes alors qu’on passe à côté de choses essentielles. Moi, j’étais dyslexique, j’ai été mis à l’écart. On me disait que je ne comprenais rien à rien. Il faudrait qu’il y ait plus de liberté à l’école, plus de travaux manuels, pratiques ». Et Mélanie se dit que « peut-être avec une école parallèle, l’entraide entre parents serait plus présente. Je pense que l’école devrait être un peu plus « optionnelle », c’est-à-dire que l’enfant pourrait aller naturellement vers ce qui le motive et qu’ensuite, il puisse se rendre compte par lui-même que ce qui ne l’a pas intéressé au début va finalement lui servir et qu’il faut qu’il s’y mette aussi ». Faute d’avoir trouvé ce qu’ils cherchaient, Mélanie et David ont décidé que Bertille irait à l’école, probablement à Sévignac « aussi parce qu’on n’a pas envie de quitter le territoire ».

De gauche à droite : Mélanie, Bertille, Lilia, Olivia, David et Jérémy : une réflexion de fond sur l’école et l’éducation des enfants.
De gauche à droite : Mélanie, Bertille, Lilia, Olivia, David et Jérémy : une réflexion de fond sur l’école et l’éducation des enfants.

Les profs n’ont pas de temps

Olivia et Jérémy ont une petite fille, Lilia qui a presque deux ans. « À l’école, les profs n’ont pas le temps de s’occuper de chaque enfant. Il y en a trop et chacun a un niveau différent. C’est pour ça que je n’ai pas envie de mettre Lilia à l’école », explique Olivia. Et Jérémy précise que « nous avons des activités saisonnières. On bouge beaucoup et c’est vrai que l’école à la maison, c’est vraiment une bonne solution. Il y a quand même une question que je me pose : c’est celle de la socialisation. Comment faire en sorte que notre enfant soit au contact des autres ? ». Olivia ne s’en inquiète pas. « Elle peut rencontrer d’autres enfants sans problème, d’autres adultes aussi. Il n’y a pas qu’à l’école qu’on rencontre du monde ». S’ils découvraient une école alternative correspondant à leurs attentes, ils seraient prêts à déménager pour y inscrire Lilia « mais entre l’école à la maison et l’école alternative, on choisira d’abord l’école à la maison parce que, encore une fois, ça nous correspond mieux et parce que notre activité nous amène à bouger beaucoup. Il y a aussi la question des journées surchargées pour les enfants, avec parfois le car, la cantine, la garderie. Ils finissent par faire des journées d’adultes ».

Quant au projet d’Emmanuel Macron, Olivia dit que ça «  fait vraiment très peur. C’est une atteinte à la liberté. Une fois de plus, on part de cas particuliers pour généraliser et punir tout le monde ».